Quantcast

Fofana : « Je suis revenu à Clairefontaine par la grande porte »

En devenant international français, Youssouf Fofana a retrouvé Clairefontaine, le centre névralgique des Bleus et de la formation française. À 15 ans, le milieu de terrain de l’AS Monaco quittait l’INF sans avoir pu intégrer le centre de formation d’un club professionnel. Dans les colonnes de L’Équipe, Fofana est revenu sur ces années charnières qui l’ont mené jusque sur le Rocher et en Équipe de France et ne cache pas qu’il a failli tout arrêter avant que Strasbourg ne le repère : « C’est arrivé deux fois. La première fois, je me suis dit, je n’ai pas fait mon année en moins de 17 ans nationaux, je suis en équipe B, c’est fini. Ce n’était pas un sentiment de résignation mais il fallait commencer à trouver autre chose en fait. (…) La deuxième fois, c’était (…) six mois avant le bac blanc, j’ai dit j’arrête, je me concentre sur mes études. Je commence à jouer en équipe une. Et je me fais repérer par Strasbourg (début 2017). Je signe en février. À un mois et demi près, j’arrêtais, en fait. »

L’INF Clairefontaine, le plus gros regret

Strasbourg lui donnera cette seconde chance et Fofana ne va pas la laisser passer, contrairement à la première : « C’est le plus gros regret de ma vie parce que ce n’est pas vraiment la faute des clubs. Les clubs, ils ont des profils à aller chercher. Peut-être que je n’entrais pas dans les critères. Et peut-être que moi, je n’ai rien fait pour entrer dans ces critères. Quand tu es jeune, c’est difficile de « manger » les mots des plus expérimentés qui te disent : « Ouais, attention, ça va vite. » Quand tu es dedans, tu ne fais pas attention. C’est ça mon plus grand regret. J’essaie de me pardonner parce que j’étais jeune. Ma faute, c’est d’avoir pensé, comme beaucoup, qu’à Clairefontaine, je n’avais pas besoin de travailler et que j’aurais un club. (…) Six mois avant la fin, je me rends compte que ceux qui n’avaient rien commencent à signer et que moi, je suis presque tout seul. Je me souviens du dernier jour (en 2014). J’ai trouvé la route très, très longue pour rentrer chez moi… »

Et le retour au « quartier » et à la vie normale n’a pas été facile pour lui : « Je redevenais un jeune lambda, entre guillemets. Je passais du car qui venait me chercher à Clairefontaine et qui me déposait au collège au passe Navigo et au métro qu’il ne fallait pas rater parce qu’il ne t’attendait pas. Derrière, il fallait que j’aille à Drancy (en club) en RER. Je rentrais assez tard, j’allais en cours (STMG) comme tout le monde. J’essayais de me refaire une vie d’homme, normal et de me refaire une santé sportivement. J’avais 15 ans et je devais tout réapprendre. (…) C’est dur, mais c’est ce qui forge en même temps. J’ai eu du mal à l’accepter la première année. » Avant de retrouver le plaisir du jeu : « Ça a mis un an et deux trois mois. La deuxième en moins de 17 ans, je suis en équipe B, c’est l’ego qui prend. Dans cette équipe B, on a formé cet état d’esprit d’équipe incroyable qui fait que t’avais envie de venir. Le plaisir, je le retrouve vraiment là. »

Fofana le livreur de pizzas

« Les gens, pour eux, c’est un chemin tracé : Clairefontaine puis clubs professionnels. Quand je reviens, moi, j’ai honte. »

Youssouf Fofana

Fofana aime également à se rappeler qu’il a dû livrer des pizzas pour gagner sa croute : « C’est anecdotique, ça a duré quelques mois, mais j’aime bien m’en souvenir, ça me permet de garder les pieds sur terre », a-t-il expliqué, avant de révéler que les mots de ses fréquentations ont pu le toucher : « Quand je sors de Clairefontaine, que je reviens au quartier, il y a beaucoup de sentiments qui se mélangent. Les gens, pour eux, c’est un chemin tracé : Clairefontaine puis clubs professionnels. Quand je reviens, moi, j’ai honte. Et les personnes, ils n’utilisent pas forcément les bons termes pour me parler. Ils te disent : « Put***, t’étais bien parti », « Ah, t’étais à Clairefontaine, maintenant t’es à Drancy. » Ça me fait mal. (…) Quelque part, toi tu t’es loupé, t’as plus le droit de parler de foot. C’était un peu dur mais tout ça, ça m’a fait du bien. En fin de compte, j’en avais besoin. »

Désormais, Youssouf Fofana est un joueur de Ligue 1 accompli et Didier Deschamps lui a permis de revenir à Clairefontaine dans une position enviable : « Quand j’apprends que je suis sélectionné (le 15 septembre), je me dis cette phrase : dix ans après. Dix ans après, je vais revenir à Clairefontaine par la grande porte alors que je l’ai quitté par la petite. Et ça, ça fait du bien. (…). Je me suis prouvé à moi et à eux que je pouvais le faire. » Et le n°19 de l’AS Monaco de raconter ses retrouvailles avec ses anciens formateurs de l’INF Clairefontaine : « Quand ils me voient arriver, ils sont contents, ils me disent : « Merci de ne pas me faire mentir. » »

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.