En 1994, on ne parlait pas encore de « clim », expression qui a fleuri ces dernières années au point d’en inspirer certaines célébrations, Maghnes Akliouche peut en témoigner. Mais lors d’une douce soirée printanière d’avril 1994, c’est bien un véritable coup de froid que Hristo Stoïchkov fit abattre sur le stade Louis-II.
La Ligue des champions de cette époque n’avait rien à voir avec celle d’aujourd’hui ou celle qui la précédait. Et pour commencer, Monaco n’aurait jamais dû y être cette année-là. Les combines de Bernard Tapie ayant trouvé une issue pénale bien méritée, l’OM se voit exclu de la compétition par l’UEFA. Deuxième du championnat précédent, le Paris Saint-Germain refuse la place et Monaco, troisième, l’accepte. Bien lui en a pris, puisque l’ASM signera son plus beau parcours en C1 cette saison-là, deux ans après une finale de Coupe de vainqueurs de coupe.
Les Monégasques entrent en 16es de finale et éliminent l’AEK Athènes avant de venir à bout du Steaua Bucarest en huitièmes. Vient ensuite une phase de groupes en guise de quarts de finale. C’est l’heure de la première fois contre le grand Barça de Johan Cruyff, Romario, Hristo Stoïchkov ou encore Pep Guardiola, ultra-favori pour soulever la coupe aux grandes oreilles. Monaco a bien négocié cette phase de groupes avec deux victoires contre Galatasaray et une autre contre le Spartak Moscou, et joue des coudes avec l’ogre catalan.
Une incompréhension entre Thuram, Petit et Ettori
Face à la formation de Cruyff, l’ASM était pourtant tombé sur un os à l’aller. Battus sèchement (0-2) avec un doublé de Txiki Begiristain, en décembre, les Monégasques avaient été comme anesthésiés par « la meilleure équipe du monde lorsqu’elle a le ballon », disait son entraîneur Arsène Wenger. Deux buts rapides pour donner un avantage au Barça en première période malgré une entame volontaire de la part des Rouge et Blanc. Malgré ça, les deux équipes se retrouvent pour la dernière journée de cette phase de groupes avec le même nombre de points, assurés d’être qualifiés et avec pour seul enjeu de finir en tête.
Comme à l’aller, les coéquipiers de Jean-Luc Ettori démarrent avec les meilleures intentions et l’envie de faire mordre la poussière à ce Barça. Mais devant le but de Zubizarreta, Jürgen Klinsmann se montre maladroit. Peu de temps après, une longue ouverture dans la profondeur de Guardiola, dans un fauteuil, sème la zizanie. La défense monégasque est aux abois, Emmanuel Petit et Lilian Thuram laissent un boulevard à Stoïchkov tandis qu’Ettori hésite à sortir. « Sur le but, les défenseurs et moi on ne se comprend pas très bien », dira ce dernier. Le Bulgare peut reprendre du gauche en pleine course et refroidir un stade Louis-II plein comme un oeuf. On joue seulement depuis 13 minutes et Barcelone vient de tuer Monaco.
« Le terrain était petit et difficile à jouer, ce qui explique que nous ayons perdu de nombreux ballons. Nous avons eu du mal à nous habituer à cette étroitesse mais après nous avons su trouver les espaces », dira Johan Cruyff à la fin de la rencontre, ce chantre du football total vêtu de son indémodable imper. Après avoir glacé la Principauté, Stoïchkov mettra le feu à la défense monégasque jusqu’à la pause, rendant la vie difficile à Petit. Pas grand-chose ne changera au retour des vestiaires, Monaco parvenant difficilement à hausser le tempo de la rencontre et se heurtant à l’organisation collective du Barça, désormais en gestion. Une plus grande agressivité en fin de rencontre offrit deux occasions à l’ASM mais le dernier rempart catalan s’interposa.
Monaco terminera 2e de sa poule avec un grand sentiment d’impuissance. On ne bouscule pas comme ça le grand Barça. Son futur adversaire, l’AC Milan, que Monaco pouvait « inquiéter en se créant plus d’espace et en organisant mieux son jeu », selon Cruyff, dominera nettement l’ASM en demi-finales (0-3) avant de montrer en finale que c’était possible, de faire mal au Barça. Très mal même.